Notre vie camerounaise

Au revoir et merci

Quels sentiments exprimer au moment de quitter les habitants de cette belle et chaude région pour retrouver les froidures de l’Europe ?

Hier soir nous avons invité pour un pot d’au-revoir les personnes que nous côtoyons depuis un an dans l’environnement du CDD et du Centre de santé. Les femmes et hommes de ménage, les cuisiniers, les secrétaires, les gardiens, les intendants, les collègues et les responsables de nos structures de travail, des voisins aussi… sans oublier les jeunes coopérants, les pères, les sœurs avec qui nous avons passé de si bons moments.

A tous nous leur avons dit merci.

Merci de l’accueil que chacun à sa manière nous a réservé. A commencer par la mise à disposition d’un hébergement de qualité, qui nous a permis d’accueillir à notre tour…

Merci pour les sourires omniprésents, donnés généreusement, de bon cœur. La joie de vivre africaine est une réalité tangible.

Merci pour les superbes paysages des Monts Mandara. Avoir des rencontres humaines enrichissantes dans un tel décor est un bonheur dont on ne se lasse pas.

 

En venant au Nord-Cameroun nous avions le modeste objectif de renforcer un peu les liens humains entre nos continents. Nous pensons que les grands projets de collaboration internationale peuvent gagner en efficacité si des hommes et des femmes, de part et d’autre, se connaissent mieux.

Amis lecteurs de ce blog, nous avons souhaité vous associer à notre relation avec cette Afrique à la fois si proche et si lointaine. Vous avez répondu « présents Â» puisque vous avez été 21 « visiteurs uniques par jour Â» (visiteur unique signifie qu’un ordinateur n’est compté qu’une fois même s’il se connecte plusieurs fois le même jour) soit un total de 7 000 visites sur 11 mois.

Au travers des 55 billets composés nous espérons vous avoir permis de cheminer dans vos idées sur l’Afrique et ses habitants. Nous avons essayé de varier les sujets… bien sûr la réalité est mille fois plus fournie ! Nous avons voulu être vrais dans nos narrations… mais tout ne peut pas être exprimé hors de son contexte vécu !

Au final, amis lecteurs, acceptez notre grand merci pour nous avoir simplement accompagnés tout au long de cette année Cameroun2010.

 

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Maryvonne recevant un cadeau de départ de l’équipe du Centre de santé de Domayo

 

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Le père Théophile, président du CDD, nous exprimant son au-revoir

Qu’est-ce qu’on mange ?

Qu’est-ce qu’on mange ? Voila bien une question récurrente dans les maisons françaises. Au Nord-Cameroun nous ne vivons pas suffisamment dans l’intimité des familles pour entendre une expression similaire. Il nous semble qu’une question fréquente pourrait être : Quand est-ce qu’on mange ?

Il est évident que les habitudes alimentaires d’ici sont assez éloignées des nôtres. Par exemple, le rythme de 3 repas par jour n’existe pas vraiment. Le repas principal est plutôt situé en fin de journée. Le matin on mange, s’il en reste, le reliquat du soir ; parfois on prépare une bouillie complémentaire. Quand au repas de milieu de journée, il est très aléatoire.

En parallèle, de nombreuses petites vendeuses (et vendeurs) proposent tout au long de la journée : beignets de froment ou de haricot, poissons frits, Å“ufs durs, mangues…

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Les enfants peuvent en acheter pour leur milieu de journée d’école, les travailleurs peuvent aussi se ravitailler à tout moment… Mais ces achats réclament d’avoir un peu d’argent dans sa poche. Alors quand les 25, 50 ou 100 F (0,15 euro) nécessaires ne sont pas là (ce qui est fréquent) on se passe de manger jusqu’au soir. Il y a chez les gens d’ici une impressionnante capacité de résistance, le ventre fait mal mais « on supporte Â», sans se plaindre.

Pour tous, ce qui nourrit vraiment c’est « la boule Â». Boule de mil ou boule de maïs - chaque groupe social à sa préférence. C’est une épaisse pâte de farine cuite à l’eau, malaxé en une sorte de pain. Ce plat est toujours servi accompagné d’une sauce à base de feuilles (légumes) d’une assez grande variété. Plus ou moins régulièrement, la sauce contient de la viande ou du poisson.

 

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Quelques amis lecteurs - dont notre petite-fille Cléo - demandent parfois : Et vous, qu’est-ce que vous mangez ? Il nous arrive, de temps à autre, de manger « Ã  l’africaine Â» (la boule et sa sauce) ; toutefois la majorité de nos repas sont « Ã  l’européenne Â».

Ce samedi matin par exemple, Maryvonne est revenu du marché avec de la viande de bœuf, des haricots verts et des yaourts locaux (en petite bouteille). Seule touche un peu exotique pour ce midi, une superbe et succulente mangue que nous avons coupée en dés dans notre yaourt. Un délice.

Vivant dans une grande ville, nous pouvons nous approvisionner en légumes et en divers produits rencontrés chez nous. Evidemment, cette façon de se nourrir n’est pas fréquente ici, alors les prix sont élevés par rapport au niveau de vie moyen (tout en restant abordables). Les pommes de terre sont à 500 F le kg (0,80 euro), les haricots verts à 600 F le demi-kg, une boîte de petit pois 1 700 F, un tout petit saucisson 3 000 F. Et puis, nous allons au restaurant un peu plus souvent qu’en France car un bon plat revient à 4 euros environ (frites et poisson frais).

Tu vois Cléo, papy et mamy ne meurent pas de faim en Afrique, et les gens d’ici non plus, même si quelques uns sont obligés d’espacer des repas par manque d’argent dans la famille.

 

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Fruits et légumes sur les photos : pastèque, melon, papaye, concombre, courgette, chou, carottes, haricot vert, taro, anacarde, tomate, canne à sucre

Pouce !

Vraiment trop chaud. Ce jeudi de l’Ascension est bienvenu. Une journée entière à ne rien faire. Juste, bien malgré soi, suer à grosses gouttes, encore et encore.

On redoutait cette période, elle est là ; pour au moins 15 jours selon les « météorologistes Â» locaux, peut-être jusqu’à un mois disent les plus pessimistes (ou réalistes).

Deux pluies d’orage sont tombées voici une dizaine de jours (2 fois 20 mm environ). Sur le coup, elles ont bien rafraîchi l’atmosphère, mais l’effet n’a duré qu’une ou deux journées.

Toutefois ces premières pluies sont le point de départ de toute l’activité agricole du Grand-Nord camerounais. On dit que beaucoup se précipitent dans leurs champs, dans la fébrilité souvent. Ont-ils raison de commencer à semer ou ferait-il mieux de patienter un peu ? Nul ne le sait. Si les prochaines pluies ne tardent pas trop (d’ici 15 j. maxi) leur pari sera bon. Si, comme l’an dernier, il se passe un mois avant un sérieux apport d’humidité, alors le semis sera à refaire !

Quant à moi, j’ai pensé ces derniers jours qu’il n’était guère raisonnable d’affronter le thermomètre pour aller rendre visite à l’un ou l’autre sur le terrain. Nos corps de blancs ne semblent rien pouvoir faire d’autre que de refroidir nos carcasses. Peut-être l’âge y est-il pour quelque chose ? Cependant, nous constatons que les Africains souffrent aussi.

 

Pour tous, l’une des choses difficiles est le sommeil. L’endroit idéal est dehors, car une fraîcheur relative arrive dans la nuit. Nos relevés de ces derniers jours donnent en extérieur : 41° à l’ombre l’après-midi, 38° le soir, 35° à minuit, 31° au petit matin. A l’intérieur de la maison ça semble « frais Â» l’après-midi : 36°, mais au matin il fait encore 34° !

Alors, suivant les conseils avisés des habitants, j’ai monté un « hangar Â» dans la cour de notre Villa-Rosa. Il s’agit d’un abri couvert de « sécos Â» (paille tressée). Nous y avons installé notre matelas, sur un lit traditionnel, en branches assemblées. Confort suprême : toute la nuit nous laissons tourner un ventilateur sur pied, une légère brise nous caresse alors le corps… au risque de nous enrhumer !

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Certains Camerounais préfèrent dormir directement sur un tas de sable, ils disent que c’est très confortable. Nous en avons bien un dans notre cour mais nous n’osons pas trop nous y installer…

Concours : A votre avis qui a bien pu faire la superbe déco qui orne notre mur d’enceinte ?

Promis, un paquet d’arachides sera offert à notre retour aux premières bonnes réponses.

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Dolce vita camerounaise

Sans commentaire ! ...



Villa rosa

« C’est une maison rose… Â» (air connu). Oui je sais, la demeure de Maxime Le Forestier était plutôt de la couleur du ciel : « C’est une maison bleue, adossée à la colline, on y vient à pied, on ne frappe pas, ceux qui vivent là ont jeté la clé. Â». Pourquoi cet air me trotte-il dans la tête à l’approche de notre nouvelle maison alors qu’elle n’a pratiquement aucun point de ressemblance avec celle du chanteur de San-Fransisco ? Préservons le mystère des associations d’idées.

Depuis début février, nous voici donc entrés dans notre home. Quelques bonnes journées d’aménagement ont été nécessaires. Cela explique notre « silence blog Â» depuis près de 3 semaines (avec en plus des activités « professionnelles Â» qui s’intensifient quelque peu, comme il se doit).

La Villa rosa est bien connue dans le quartier Djarengol. Jusqu’en décembre 2009 ce lieu servait de cybercafé. Son grand mur d’enceinte vient de recevoir une nouvelle couche de rose flashy !

Heureusement, c’est un bleu tendre qui a prévalu pour la plupart des autres faces intérieures et extérieures. Nous aimons bien.

Arrosage et décapage général des fenêtres et du sol, rideaux ici, petits meubles là, tournevis par-ci, lubrification par-là, petit à petit la grande maison poussiéreuse devient un chez-nous.

C’est le CDD qui loue cette habitation pour nous. Bien que sa dimension soit au-delà de ce que nous aurions souhaité, elle a deux grands avantages : primo, elle est tout proche de nos lieux habituels de travail ; secundo, de hauts murs la protègent d’intrusions malveillantes. Cette protection n’est pas spécialement à notre goût mais il semble bien que ce soit simplement du bon sens.

Cela ne nous empêche pas d’entrouvrir la grande porte, aux voisins et enfants du quartier qui viennent se régaler de biscuits offerts par la « nasaara Â» (la blanche).

Encore un avantage, et non des moindres, nous avons une chambre totalement disponible pour les amis, alors si un taxi brousse (ou même un avion parfois) vous amène jusqu’à Maroua n’hésitez pas à solliciter un petit coin de natte !

Nono est parti.

Partir, il nous faut tous partir !

Mais pas comme ça, pas si vite, pas sans se préparer, pas en nous laissant désemparés, pas à cet âge, pas en abandonnant deux jeunes enfants, une épouse, une mère, un père, un frère, une sœur, des tantes, des oncles, des cousines, des cousins, des amis, des connaissances…

Dimanche, à 10 h 15, un SMS nous apprend la terrible nouvelle : Nono est mort, écrasé sous un arbre…

Maryvonne s’écroule. Non, ce n’est pas possible. Pas lui.

 

Pourquoi vous associer à cette souffrance, amis lecteurs ? Peut-être parce qu’une douleur partagée est aussi allégée ; qui d’entre-nous ne l’a déjà expérimenté ? Peut-être aussi, parce que nous avons pris le parti de vous associer, durant cette année, à quelques moments forts de nos vies ; de vous unir à ce que cette vie loin de l’Europe nous apporte de joies, d’étonnement, de découvertes… et de tourments aussi. Vous êtes plusieurs à nous écrire que cela vous touche, et nous ne pouvons répondre à chacun…

Alors, ce journal en ligne vous crie la nouvelle qui nous frappe au cÅ“ur : Arnaud a quitté notre monde, et nous sommes loin, très loin de nos proches…

 

Arnaud était le gai luron de la famille, conteur inégalable de ses aventures… Le jour de son anniversaire, 36 ans, dans la campagne qu’il aimait, de sales ronces l’ont empêché de se retirer à temps de l’arbre qu’on abattait. Hémorragie interne, son souffle s’est éteint, en présence de son père, son frère et son beau-frère.

 

Pour Maryvonne, Nono était non seulement son filleul mais aussi comme son « premier fils Â». Bébé, elle l’avait pris en particulière affection quand sa mère était devenue jeune veuve. Ces liens se sont maintenus par la suite, même quand Arnaud a bénéficié d’une immense complicité avec son nouveau papa.

 

Permettez-nous de vous confier le message que Maryvonne a composé pour sa cérémonie d’enterrement.

Mon Nono

Samedi après-midi, jour de ton anniversaire, en me promenant dans la brousse au Cameroun, je pensais à toi et à Marie-Claire ta maman…  au plaisir que j’aurai à vous faire découvrir ces paysages Africains au mois d’octobre prochain.

Toi si curieux de tout ce qui intéresse l’humain et tout particulièrement de ce que nous vivons ici.

Pendant ce temps là, dans ta belle vallée, tu nous quittais définitivement.

Comment y croire ?

Bien que des milliers de kilomètres nous séparent, je voudrais te dire Au-revoir.

Je veux croire que tout l’amour, l’amitié et la joie que tu as su nous donner ne sont pas perdus à jamais.

Nous n’oublierons pas le Nono qui nous faisait rire, qui était toujours là quand quelqu’un avait de la peine.

Désormais, tu seras avec nous dans une nouvelle présence.

Prends par la main ta famille et accompagne chacun de nous sur le dur chemin de la séparation

Ta marraine.

Un jour ordinaire

Le temps ? Aurions-nous déjà oublié nos sempiternelles préoccupations d’Européens ! Du temps qui passe (trop vite), du temps qu’il fait (trop froid) du temps à venir (tout programmé) ?

Heureusement, dans un commentaire sur ce blog, voilà que Louis-Marie nous rappelle à un peu de réalité : Parlez-nous de votre vie quotidienne ? La juste réponse serait : Eh bien on vit, tout simplement on est là et on vit. Mais nous sentons poindre une pincée d’impatience : Et encore ?

Alors OK, voici quelques éléments de vie ordinaire...

Le temps qu’il fait. Ciel sans nuage, bleu vif, virant parfois au grisâtre avec un soleil un peu masqué. Températures évoluant au métronome ; ces jours-ci : 25° le matin et 35° l’après-midi. Au jour de l’an, nous avions 20° et 30° ; on nous promet 30° et 40° pour début février. Et ça ne sera pas fini !

La santé. Vraiment rien à signaler. Actuellement nos organismes supportent bien la chaleur ; celle de l’AM nous fatigue un peu, mais nous récupérons la nuit, et les matins nous trouvent plutôt dispos.

Il faut dire aussi que nos menus sont de type européen (pas encore de boule de mil) avec des fruits locaux à chaque repas, papaye à volonté.

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Notre logement. Camping amélioré. Nous occupons une chambre dans la structure d’accueil de l’évêché. Plutôt confortable par certains côtés, aucun souci d’intendance, couverts assurés. Cependant, envie croissante de disposer d’un chez nous. Une maison toute proche nous est promise, mais elle a besoin d’un peu de réfection… et nous n’apercevons guère d’ouvriers s’y empresser !

Nos lieux de travail. Pour le moment, à part quelques escapades, je me tiens principalement dans l’enceinte de la mission catholique. Là se trouve le siège du CDD (dont les services occupent trois petits bâtiments) et d’autres instances du diocèse : l’accueil des passagers, la « procure Â» (services administratif et financier), un atelier de mécanique…


Quant à moi, Maryvonne, je suis affectée au centre de santé du quartier de Domayo  Situé à environ 3 km de l’évêché, c’est un vrai plaisir de m’y rendre à pied le matin, accompagnée par les « Bonjour nasaara Â» (Bonjour la blanche) des enfants qui vont à l’école. Ici pas de « pédibus Â» mais une ribambelle de gamins vêtus de la tenue de leur école. De temps en temps, certains - plus fortunés ou habitant loin ? - se retrouvent sur la moto-taxi (2 devant le chauffeur et 3 derrière). Les malades arrivent au Centre à 7h30, je rejoins vite l’équipe qui m’a très bien accueillie. J’espère que je serai à la hauteur de leurs attentes ! Pour l’instant j’observe.

Les horaires. 7h petit déjeuner, 7h30 à 12h30 travail, 12h30 repas, 13h30 sieste, 15h à 18h travail, 19h30 diner. Mais, rassurez-vous, le vécu est parfois assez loin de cette rigueur affichée…

Les nuits sont scandées de repères : 4h, appel du muezzin de la mosquée voisine ; 5h, chant du coq annonçant le lever du soleil ; 5h30, carillon du grand séminaire tout proche ; 6h15, petite cloche pour la messe dans le « boukarou Â» de l’évêché. Et déjà le petit déjeuner est servi.

Les week-ends. Flânerie dans les marchés, découverte de Maroua (ville très agréable), lessive (vite séchée), messe du dimanche (2 bonnes heures !), messagerie électronique et blog. Et puis aussi repos, car qui veut aller loin ménage sa monture, n’est-ce pas.

A bientôt...