Quel touriste peut quitter l’Afrique sans s’être procuré une ceinture, un sac à main, une sacoche, une paire de chaussures… dont il ne manquera pas d’indiquer à ses amis leur provenance d’artisans locaux ?

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Chacun sait que ces objets sont le résultat d’une élaboration débutant par le tannage du cuir. L’élevage étant bien implanté dans la région, Maroua abrite une tannerie artisanale qui peut se visiter. Le circuit démarre avec une négociation serrée sur le prix demandé par le guide. Nous savons que le « smic Â» d’un manÅ“uvre est d’environ 1 000 F CFA par jour (1,50 euro), aussi trouvons-nous exagéré qu’un tel montant soit demandé à chacun d’entre-nous pour une simple visite. Finalement, Abba nous guidera avec gentillesse et compétence pour 500 F par personne.

 

La tannerie s’approvisionne en peaux dans les quelques abattoirs de bovins de la ville (qui ne sont que de simples hangars affectés à ce service) ou dans les abattages domestiques de petits animaux, chèvres et moutons.

 

Procédé de tannage des peaux

1. Peau fraîche ou semi-sèche immergée durant trois jours dans une eau chargée de cendre de bois et de chaux (trous au premier plan de la photo générale du site).

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2. Enlèvement des poils avec un grand couteau. Opération délicate, il ne faut pas percer la peau.

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3. Nettoyage des poils restant et enlèvement de la chaux par un trempage dans une eau chargée de fiente d’oiseaux. Ces fientes en grande quantité sont récupérées dans la région de Yagoua où nichent d’immenses colonies d’oiseaux granivores, les mange-mil. Soit dit en passant, dans une bonne partie de l’Afrique ces passereaux causent de graves dégâts dans les récoltes. Maryvonne a pu en observer un impressionnant ballet en visitant le parc naturel de Wasa.

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4. Assouplissement par brassage manuel dans un troisième bain contenant des graines pilées d’acacia. Pour accélérer son pouvoir d’assouplissement la solution de poudre d’acacia peut être chauffée. La récolte des gousses se fait dans le voisinage car des plantations ont été mises en place autour du site.

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5. Il ne reste plus qu’à faire doucement sécher ces peaux sur des cordes tendues un peu partout. Ici tout est vraiment artisanal et naturel. Seule la coloration éventuelle des cuirs s’effectuera dans un bain de produits chimiques.

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Ce dur travail est-il rentable ? Dès l’abord, notre guide s’est plaint de la concurrence des tanneries industrielles du Nigéria qui offrent un meilleur prix - jusqu’au double - pour la matière première. Ici une peau brute est achetée 500 F en moyenne pour être revendue tannée à 1 000 F CFA. Il nous dit que les travailleurs d’ici sont payés à la tâche et qu’ils gagnent bien leur vie. Toutefois aucun d’entre eux ne se contente de cette activité, ils sont tour à tour maçons, cultivateurs, petits vendeurs… au gré des opportunités. Mains à tout faire n’est-ce pas ?

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Selon leurs besoins, les artisans locaux viennent sur place s’approvisionner en peaux tannées. Apparemment leurs demandes déterminent le volume traité sur le site. En ce moment on nous parle de 400 peaux par jour.

Le produit fini, agréable au toucher, se retrouvera bientôt transformé en de multiples objets utiles et esthétiques. Quelques uns orneront les étals en attendant que des touristes, hélas trop rares, se laissent tenter.

 

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